2 pistes pour se lâcher la grappe

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Se lâcher la grappe. Voilà une idée qui peut devenir d’un coup terriblement parlante.

A toutes celles et ceux qui se mettent une pression considérable pour perdre du poids par exemple (et qui par le biais de cette pression s’en empêchent, bien souvent).

A toutes celles et ceux qui s’imposent un rythme effréné au nom d’objectifs qui s’additionnent plus souvent qu’ils ne s’atteignent.

A toutes celles et ceux qui se posent mille questions sur leur apparence, leurs choix, l’avis des autres, sur l’avenir à court-terme, à moyen-terme, sur les pourquoi dont on ne saura jamais rien et les conséquences imprévisibles.

Il semblerait qu’on arrive tôt ou tard à ce besoin, comme une étape de notre développement personnel à cette époque.

Un point de passage qu’on pourrait facilement comparer à une mue.

On se déleste d’une peau de questionnements insatiables et de charge mentale comme d’une veste trop serrée, et on enfile quelque chose de plus léger, de plus échancré, qui nous laisse beaucoup plus de mouvement, d’air, de fraicheur.

Moins de congestion, moins de frictions, c’est peut-être beaucoup dire mais… comme un sentiment de liberté.

Matthieu Ricard le dit très bien : « être libre, c’est être maître de soi-même. C’est prendre sa vie en main, au lieu de l’abandonner aux tendances forgées par l’habitude et à la confusion mentale ».

On retrouve ici tous les affluents du besoin de se lâcher la grappe.

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La confusion mentale ainsi que l’influence et la diffusion des tendances forgées par l’habitude en départ de notre randonnée, et la liberté en point d’arrivée.

Avec au milieu l’idée de se lâcher la grappe comme déclic pour passer du départ à l’arrivée ?

Oui mais pas seulement.

Cette idée de se lâcher la grappe, elle n’est que la question.

En soi, elle est une réponse à l’oppression qui nous y conduit. Mais elle n’est pas la solution, elle est un appel à la solution.

La réponse, il va falloir aller la piocher dans les livres des grands penseurs de l’histoire ou dans les paroles de ceux qui sont encore là.

Et il n’y en a pas qu’une, il y en a plein. Toute la subtilité quant à leur découverte tourne autour de la compatibilité entre le message d’un côté, et notre perception de l’autre.

Il va falloir chercher parmi les réponses, celles qui nous parlent. Comme si elles étaient écrites en 1001 langues et que nous ne sachions en lire qu’une ou deux.

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On peut voir ça comme une question de fréquence.

Vous avez déjà soufflé dans ces sifflets pour animaux qui produisent des ultrasons que notre oreille ne peut donc pas capter et qui pourtant font tourner la tête de tous les animaux présents dans les environs ?

Notre audition, celle des chiens, des chats, etc, ne sont pas placées au même endroit sur le spectre sonore. Et même chez l’être humain, d’une personne à l’autre, on peut voir des différences.

Et bien pour créer des déclics et ancrer des prises de conscience, tout porte à croire que c’est la même chose.

Les écrits et les travaux des grands penseurs se diffusent sur des fréquences différentes, et nous ne captons pas tous les choses de la même manière.

Exactement comme si nous nous situions tous à des emplacements légèrement différents de la gamme des fréquences.

Comme on le dit instinctivement : il y a des choses qui nous parlent, et des choses qui nous parlent moins.

De ce fait, il faudra chercher les paroles qui se trouvent dans notre propre champ de perception.

Pour certains, la philosophie zen sera pile au bon endroit, et la lecture du Tao ou des écrits de Taisen Deshimaru, d’Alan Watts ou de Dogen par exemple feront des merveilles (c’est mon cas). D’autres en revanche n’y entendront que des paroles mystérieuses et relativement abstraites, et s’y retrouveront davantage dans les écrits de philosophes contemporains comme Alexandre Jollien et son petit traité de l’abandon par exemple, ou Christophe André, Matthieu Ricard, Eckhart Tolle, Deepak Chopra, etc.

Donc il me sera impossible de proposer ici deux pistes sûres.

Elles seront plus ou moins parlantes. Plus ou moins parlantes sur le coup et peut-être un peu moins avec le temps. Ou au contraire, plus ou moins parlantes et de plus en plus avec le temps.

Mais si je les ai regroupées ici, malgré tout ce qu’on vient de voir ensemble, c’est qu’elles me semblent tout de même posséder un petit côté universel, ou tout du moins, un côté très parlant à la génération qui est la nôtre.

La première puise ses racines dans la pensée Zen mais n’occupe le papier que depuis les années 50 et la parution d’un de mes livres préférés : « Eloge de l’insécurité ».

La seconde quant à elle, est on ne peut plus contemporaine puisqu’elle nous vient de Steven Pressfield et d’une discussion avec Rich Roll.

Voyons ensemble ce qu’elles ont à nous apporter.

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1. La loi de l’effort inverse

La loi de l’effort inverse nous dit qu’il faut vouloir mais ne pas s’obstiner.⁠

Alan Watts la présente ainsi :  ⁠ »quand vous essayez de rester à la surface de l’eau, vous coulez ; mais quand vous essayez de couler, vous flottez ».

Il faut un objectif, une direction dans laquelle partir quand on se lève le matin comme dit Matthieu Ricard.  

Mais il faut raisonner son pas.

Pour bien comprendre cette subtilité, j’aime beaucoup prendre l’exemple du mélange eau + maïzena.

Ce mélange on ne peut plus hors du commun donne ce qu’on appelle un fluide non-newtonien et possède des propriétés très surprenantes.

Si on frappe dedans, avec son poing ou même avec un marteau, on a l’impression d’avoir affaire à une matière presque aussi solide que de la pierre. Mais si on enfonce doucement sa main dedans, on la traverse comme une vulgaire pâte à crêpe.

Et voici où est la parallèle avec notre loi de l’effort inverse.

Pour traverser le mélange (parvenir à notre objectif), il faut tout de même une vitesse : si on ne dirige pas sa main vers le fond du saladier, on reste à la surface comme si on avait mis un grand coup de poing dedans.

C’est la fameuse direction dont parle Matthieu Ricard et dont on a besoin.

Mais si cette vitesse est démesurée, la pâte a crêpe se change en béton et il n’y a plus aucun moyen de passer à travers.

Il faut vouloir mais ne pas s’obstiner.

La loi de l’effort inverse, ce n’est pas être attentiste, c’est être doux.

Et cette approche tempère nos deux pôles aujourd’hui.

La course effrénée d’un côté. La « rat race » comme les américains la surnomme. C’est le trop plein.

Et la léthargie de l’autre, dans laquelle certains sont aujourd’hui englués. C’est l’absence de direction au réveil. C’est la main qui ne descend même pas vers le fond du saladier.

Tout ça est parfaitement résumé par une vieille histoire zen.

Un jour, un jeune méditant qui souhaitait transcender son existence par la méditation s’est mis à la recherche d’un vieux moine capable de lui dire combien de temps il devrait dédier chaque jour à la méditation pour parvenir à son objectif.

Après un long périple, il tomba sur le monastère, complètement reculé dans la nature et tenu, comme on lui avait dit, par ce vieux moine qu’il cherchait.

Il se présenta au moine, lui expliqua son envie et lui demanda combien de temps il lui faudrait pour transcender son existence s’il méditait 4h par jour.

Le moine réfléchi silencieusement et lui répondit : « si tu médites 4h par jour, il te faudra 10 ans ».

Peu satisfait par cette réponse, le jeune méditant un peu impatient lui demanda dans la foulée : « si je médites 8h par jour, combien de temps me faudra-t-il ? ».

S’attendant à réduire de moitié le temps nécessaire, le jeune méditant fut complètement déboussolé quand le moine, après avoir réfléchi, lui dit : « si tu médites 8h par jour, il te faudra 20 ans ».

Incapable de comprendre pourquoi en méditant deux fois plus, il lui faudrait deux fois plus de temps, il demanda au moine plus d’explications.

« Le but de la vie n’est pas de passer à côté ».

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2. La vie est… longue

On a beaucoup entendu « la vie est courte ».⁠

C’est par exemple un point de pivot pour de très nombreuses pensées stoïciennes.

Sénèque et Marc-Aurèle s’en sont beaucoup servi pour distiller de très chouettes idées sur la mise en branle face à la léthargie.

Des idées que l’industrie du développement personnel et de l’entreprenariat  notamment se sont beaucoup appropriées pour construire leur marketing.

Le principe de cette approche, c’est de se mettre en mouvement, de passer à l’action, de ne pas se faire avoir par le piège de la suffisance, de ne pas tant s’écouter et de foncer.⁠

Et il y a un certain sens derrière ça, car de nos jours on peut vite se retrouver détourné, pris dans un tourbillon de stimulations et balloté de distractions en distractions.

Mais comme d’habitude, il y a beaucoup de nuances à apporter.⁠

Et on le perçoit d’autant plus avec la piste précédente et l’idée d’une volonté sans s’obstiner.

Contre ce principe que la vie est courte et surtout le binaire dans laquelle il peut nous projeter si le message est entendu sous sa forme brute, Steven Pressfield a ce raisonnement hyper rassurant et très humaniste…

En s’adressant notamment aux plus jeunes, il dit qu’en fin de compte, la vie n’est pas courte, elle est longue.⁠

Quand il avait 30 ans, il était encore à 21 ans de publier son premier livre. Et ce alors même qu’il s’est donné comme il a pu pour écrire, et que c’était son grand projet personnel.⁠

Il faut se lâcher la grappe et éviter le piège de se mettre soi-même énormément de pression.⁠

Il faut rester curieux, ouvrir les yeux, vivre tout ce qu’on a à vivre.

On est continuellement exposés à l’idée qu’il y a un « hack », qu’il y a quelque chose qu’on peut faire pour réussir d’un coup dès demain.⁠

Il faut apprécier le chemin tout entier.⁠

Il faut garder les yeux ouverts sur la route.⁠


« Quand ce sera prêt, si ça doit arriver, ça arrivera. »⁠

Ce discours change, et il est très rafraichissant. Surtout venant de l’auteur de The War Of Art, le livre iconique de la sphère motivationnelle, qui traite de la résistance et du « combat » des créatifs pour produire leurs idées.⁠

Cette approche, c’est une approche douce et pleine de raison. Une approche qui résonne beaucoup avec notre première piste et notre eau – maïzena.

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